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Yanluowang, gardien et juge de l'enfer

© Chine Informations - La Rédaction

Yanluowang 阎罗王 (l'Empeureur Yanluo) est un dieu chinois d'origine bouddhiste, gardien et juge de l'enfer. Très présent dans l'imaginaire grâce à l'iconographie et aux contes populaires, il ne possède aucun temple en propre, comme toutes les déités d'aspect trop féroce. Tout au plus trouve-t-on quelques rares sanctuaires où il est honoré en même temps que neuf autres collègues (ex : temple des Dix rois des enfers de Yaumatei 油麻地 à Hong Kong). A Taïwan, une place est parfois faite aux Dix rois des enfers dans le temple du Dieu de la muraille et des douves. Yanluowang lui est en effet est associé dans le bouddhisme populaire et la religion traditionnelle, tout comme il l'est au bodhisattva Dizangwang. Ces trois divinités sont liées au monde infernal.

Origine et évolution

Yanluowang, gardien et juge de l'enferA l'origine de Yanluowang on trouve la déité hindouiste Yama, mentionnée pour la première fois dans les Vedas, Dieu de la mort régnant à la fois sur le Paradis et l'Enfer, nommé nakara et situé sous terre au Sud de notre monde. Ses fonctions dans le bouddhisme mahayana sont limitées au jugement des âmes et à la gestion des enfers. Quoique surhumain, il n'a pas encore échappé à la samsara, contrairement à Dizangwang, version sinisée du bodhisattva Ksitigarbha. Selon une tradition, il est lui-même tourmenté chaque jour par ses propres sbires, et n'échappera à ce sort que lorsqu'il commencera l' étude du dharma. Dans le bouddhisme vajrayâna , c'est une déité de rang secondaire, "gardien de l'espace", situé comme Ksitigarbha dans la lignée de Ratnasambhava, bouddha du Sud, direction néfaste. En tibétain il est nommé Gsin-rje. Il est parfois représenté tenant entre ses mâchoires la roue des réincarnations. Le bouddhisme japonais le connait sous le nom de Emma ou Yemma.

Adoption par le taoïsme et la religion populaire

Puisant dans différents textes indiens et dans la culture locale, la tradition chinoise propose plusieurs versions concernant le nombre des enfers et des divinités qui sont à leur tête. Il semble qu'à l'origine il y ait eu deux versions concurrentes : 136 enfers (8 grands divisés chacun en 16 plus petits) ou 18, chacun d'entre eux étant dirigé par un roi subalterne de Yanluowang.

Elles furent fortement concurrencées à partir des Tang par une nouvelle version influencée par le taoïsme, qui a adopté Yanluowang pour en faire le cinquième d'un ensemble de dix rois (shidianyanwang 十殿閻王) nommés chacun à la tête d'un enfer par l'Empereur de jade. Les neuf autres rois sont : Qinguangwang 秦廣王, Chujiangwang 楚江王, Songdiwang 宋帝王, Wuguanwang 五官王, Kachengwang 卡誠王, Taishanwang 泰山王, Pingdengwang 平等王 Dushiwang 都市王 Zhuanlunwang 轉輪王, noms typiquements taoïstes. Ils concurrencent Bei Di, un autre dieu taoïste du monde des morts. Yanluowang reste néanmoins le plus célèbre, et de loin le plus présent dans l'iconographie.

Il arrive pourtant qu'il disparaisse totalement de la liste, faisant place à un personnage historique, magistrat intègre de son vivant nommé juge des morts par une divinité supérieure, le plus souvent le juge Bao, (Baogong 包公 ou Bao Cheng包承) de l'époque des Song.

Quelquefois on lui prête trois assistants nommés "vieillesse", "maladie" et "mort".

Il est parfois associé, seul ou avec ses neuf collègues, au Dieu de la muraille et des douves, une sorte de fonctionnaire territorial divin avec pouvoir de juridiction sur sa circonscription, y compris les enfers. Il devient alors un des juges à son service ou son collaborateur.

Les enfers

Le roi des enfers dirige un petit personnel de démons souvent représentés avec une face animale, chargés de capturer les âmes que leur méchanceté a désigné à son attention et de tourmenter les damnés. Ce sont eux-même des créatures ayant mal tourné et leur fonction est aussi une sorte de punition. A l'issue de leur peine, qui peut parfois être très longue, les âmes sont réinsérées dans le cycle des réincarnations après l'absorption d'une potion d'oubli.

Le bouddhisme a joué un grand rôle dans la diffusion de l'image de l'enfer et des punitions terribles promises aux pécheurs. Néanmoins, cet enfer se superpose à la représentation du monde des morts issue de la religion chinoise, et la croyance en la réincarnation est quelquefois la seule trace d'idéologie bouddhiste qu'on y trouve. Le monde des morts est alors un reflet de celui des vivants, administré de façon similaire. Les démons, par exemple, y sont des gardiens que la famille du défunt peut soudoyer par des offrandes de papier-monnaie, d'où l'importance des cérémonies en faveur des morts sans famille comme celles de la fête des fantômes. Dans le temple de Yaumatei on peut voir la représentation d'un homme portant un carcan qui offre de l'encens aux Dieux des enfers. Il s'agit d'un mort sans sépulture, ramassé comme un vulgaire vagabond par la police démoniaque et amené devant le juge divin, qui déterminera grâce à sa clairvoyance s'il est criminel ou victime, et veillera le cas échéant à ce que justice lui soit rendue.

Dans la version plus bouddhiste de l'enfer, les démons tourmenteurs sont des émanations de l'âme impure des damnés, et le salut tient autant à la valeur spirituelle des prières des vivants qu'à la force magique des cérémonies.

Identité confuse

Dans l'univers très syncrétiste et peu dogmatique de la religion chinoise, l'interprétation de Yanluowang peut varier grandement de personne à personne. Si certains reconnaissent en lui une divinité bouddhiste, d'autres le considèrent comme un dieu taoïste en concurrence avec le bodhisattva Dizangwang. Généralement vu comme une divinité effrayante, il peut également présenter l'image plus rassurante d'un juge intègre et juste ou d'un défenseur du dharma.

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