Kangxi
L'empereur de la dynastie Qing Xuányè 玄晔 (nom personnel) Kāngxī 康熙 (nom de règne) est né le 4 mai 1652 à Beijing dans la Cité Interdite et mort le 22 décembre 1722. Il fut l'empereur qui eut le règne le plus long de l'histoire de la Chine, de 1661 à 1722, soit 61 ans.
Il était le fils d'une concubine issue d'une famille Jurchen (ethnie à laquelle appartiennent les Mandchous). Sinisée de longue date, elle portait le nom chinois de Tong (佟), mais avait repris un nom mandchou (Tunggiya) à l'avènement des Qing. La mère de Kangxi était donc certainement en partie une Han. Une légende fait de Kangxi le fils secret d'une autre concubine, Dong Guifei, dont son père était très épris, et à la mort de laquelle il aurait pris l'habit de moine en feignant sa mort. On peut encore en entendre les échos de nos jours.
Kangxi pensait déjà pouvoir régner à l'âge de 16 ans. Cependant, son père lui avait choisi comme régent un ministre du nom de Oboi (Aobai) 鳌拜 qui ne lui a pas laissé le pouvoir comme convenu. On peut se plaire à penser que Kangxi était un enfant très brillant, car grâce à son habileté et l'assistance de sa grand-mère l'impératrice douairière Xiaozhuang, il réussit à faire lâcher prise à Oboi et à l'emprisonner en 1669.
Il n'avait pas fini de faire ses preuves car il dut encore faire face en 1673 à la grande rébellion des « trois feudataires », les provinces de Yunnan, Sichuan et Guangdong ayant fait sécession simultanément. Les armées impériales réussirent à rétablir la paix durablement, même si certaines révoltes éclatèrent dans les marches montagneuses du Sud-Ouest. Il y eut notamment la fameuse révolte tibétaine matée avec l'aide de moines Shaolin. Il réussit à rétablir davantage de pouvoir sur le Tibet et y établit un protectorat.
Il avait ordonné en 1662 , pour libérer l'empire des mouvements Anti-Qing, le « Grand dégagement », déplacement forcé vers l'intérieur des terres des populations des côtes du Sud-Est où le parti des Ming était encore puissant. Le pirate Koxinga, qui se battait aux côtés des princes du Sud de la Chine restés fidèles à la dynastie précédente, avait cette même année pris l'île de Taiwan aux Hollandais pour s'y réfugier ; il y fonda l'éphémère dynastie Zheng que les armées impériales combattirent avec détermination. Elles finiront par reprendre l'île à son petit-fils en 1683. A partir de 1684 fut organisé le repeuplement des régions côtières dépeuplées par le Grand dégagement, assorti d'encouragements financiers.
La rébellion des Mongols Chakhars commencée en 1675 fut matée en deux mois, et ils furent incorporés aux bannières. L'empire Qing se retrouva ultérieurement entrainé dans des luttes intra-mongoles, les Khalkha qui se déclaraient vassals de la Chine ayant requis son aide contre leurs assaillants les Dsungar. Leurs disputes étaient en rapport avec la politique tibétaine, que les Mongols contrôlaient en grande partie depuis le XIIe siècle. Les Dsungars furent repoussés mais non anihilés, et occupèrent le Tibet en 1717 en représailles de l'éviction du Dalaï Lama en 1706. Le protectorat Qing sur le Tibet ne fut établi qu'en 1720.
L'empire mandchou entra également en conflit avec l'Empire russe le long de l'Amour, en 1650 (victoire chinoise) et à partir de 1680. Le Traité de Nerchinsk signé en 1689 attribua la vallée de l'Amour à la Chine et fixa le tracé de la frontière russo-chinoise.
Kangxi ordonna la réparation du Grand Canal construit par les Sui, plus de mille ans auparavant.
L'empereur savait que l'agriculture était la clé de l'État ; il organisa donc des exonérations fiscales spéciales pour les campagnes. Le niveau de vie fut considérablement amélioré pour les simples villageois. De plus, les fonctionnaires, mieux rémunérés, furent moins enclin à se livrer à la corruption, plaie endémique de l'administration chinoise. En 1675 naquit son successeur Yinzhen (futur Yongzheng) ; à cette occasion six eunuques furent élevés à des dignités de fonctionnaires civils.
Il commanda la composition du plus grand ouvrage sur les caractères chinois et le plus exhaustif jamais créé. On l'appela le Dictionnaire Kangxi. Depuis, ce dictionnaire de caractères a été largement dépassé en taille. Il introduisit les 214 clés de classement des caractères chinois qui sont toujours largement utilisées (214 clés de Kangxi).
Kangxi avait eu de nombreux fils et choisit son héritier avec beaucoup de soin. Il dut abandonner son premier choix, son deuxième fils le prince Yinreng (胤礽), nommé prince héritier à 2 ans, mais qui s'était avéré extrèmement décevant malgré la précaution que l'empereur avait prise de surveiller lui-même son éducation. Yinreng perdit définitivement son titre en 1712. Le choix finit par tourner autour de deux candidats nés de la même mère, dont les noms personnels étaient homonymes (Yinzhen), la graphie ne différant que par un détail du second caractère : 胤禛 et胤禎. Kangxi avait tenu à garder secrètes ses dernières volontés concernant sa succession, qu'il avait placées dans une boîte. L'un des héritiers présomptifs, quatorzième fils de l'empereur, était en campagne dans le Xinjiang au moment de la mort de son père. Lorsqu'il fut proclamé que le nom inscrit était celui du seul présent, le quatrième fils, une rumeur naquit prétendant qu'il avait ajouté un trait au nom du véritable élu. Quoi qu'il en soit véritablement, il devint l'empereur Yongzheng, et le nom de son frère évincé fut changé en Yinti, pour respecter la règle qui veut que personne ne porte un nom similaire à celui de l'empereur.
Le véritable choix de Kangxi est le deuxième des "quatre mystères de la dynastie Qing", le premier étant le destin final de son père, l'empereur Shunzhi.
Kangxi est enterré dans la nécropole Est des Qing.