Bouddhisme mahāyāna ou Grand Véhicule
Le bouddhisme mahāyāna, terme sanskrit signifiant « Grand Véhicule », est postérieur au bouddhisme hīnayāna (voir aussi Bouddhisme theravāda, « doctrine des Anciens »). Ce bouddhisme ne se limite pas aux seuls écrits du Bouddha historique, les sûtras «de la première roue», mais s'appuie aussi sur des textes postérieurs : les sûtras «de la deuxième roue», ainsi que des exégèses et les écrits d'autres « maîtres ».
Histoire
Origines
Le bouddhisme mahāyāna consiste en une forme de bouddhisme développée aux alentours du Ier ou du IIe siècle ap. J.-C. à partir de la doctrine des Anciens, jugée trop austère.
Le mahāyāna est probablement issu de l'école Mahāsaṅghika, qui engendra les courants dits ekavyavaharika et lokottaravadin. Il aurait également été influencé par le sautrantika. Jusqu'au VIIe siècle, les moines du bouddhisme hinayana et du mahāyāna pratiquent dans les mêmes monastères, suivant les mêmes règles.
Selon la tradition, Gautama Bouddha aurait d'abord prêché les sûtras de la première roue. C'est au «pic des Vautours» qu'il aurait fait l'enseignement des textes de deuxième roue, destinés aux disciples les plus avancés.
Diffusion
Le grand véhicule est surtout présent en Inde du nord, en Chine (sous la forme 禪 chán ou Jingtu), en Corée (le « Son », dont notamment l'école « Chogye »), au Japon (le zen) et dans le sud-est asiatique. Il a donné naissance, au Tibet, à une nouvelle forme de bouddhisme, le lamaïsme, qui est une forme du Vajrayâna (en sanskrit « véhicule du diamant »), empreinte d'hindouisme, de chamanisme et d'une magie propres aux peuples tibétains.
Enseignement
L'absence de nature propre (autrefois limitée à la personnalité) s'étend dans le Mahāyāna à tous les phénomènes. Nāgārjuna ira jusqu'à affirmer que le saṃsāra et le nirvāna sont comme « les deux côtés d'une assiette (ou d'une pièce) ».
Fortemenent inspirés de l'hindouisme, les préceptes du mahâyâna réintroduisent des idées éliminées par le Bouddha, le salut par la dévotion, le ritualisme ou la présence de divinités (que la mahāyāna a parfois absorbées par syncrétisme à partir d'autres religions, comme le taoïsme ou le shintoïsme). À la rigueur et la discipline personnelle du « Petit Véhicule » (telle est l'expression péjorative des tenants du mahāyāna), le « Grand Véhicule » oppose la compassion et l'intercession par les bodhisattva, dont la sagesse personnelle est utilisée pour venir en aide à autrui. Les laïcs peuvent accéder au nirvāna, à condition qu'ils pratiquent en développant avec foi l'amour et la compassion envers autrui, et effectuent quotidiennement les exercices de yoga enseignés par leur guides spirituels.
Alors que dans la doctrine des anciens le but ultime est de devenir soi-même (et pour tous les êtres) un arhant, dans le mahâyâna l'état de bodhisattva prime. Le Bouddha, de personnage historique, devient dans la doctrine des trois corps l'émanation d'un bouddha cosmique comme peut l'être Vairocana, une divinité panthéiste et syncrétique englobant en son sein les anciennes divinités. Ces déités représentent des qualités vers lesquelles doit tendre le pratiquant, le but étant de développer les causes qui vont permettre d'élargir sa conscience et d'établir l'être dans des actes libérateurs de l'attachement au concept du moi.
Textes
Les soûtras du bouddhisme mahāyāna sont nombreux. Certains (le Sûtra du Diamant et le Sûtra du Cœur notamment), sont récités quotidiennement dans de grandes parties du monde bouddhiste. D'autres ont formé la base du développement de certaines écoles. Citons par exemple :
- Le Sûtra du Cœur, qui est probablement le texte bouddhique le plus connu.
- Le Sûtra du Diamant.
- Le Sûtra du Lotus, écriture importante de certaines écoles chinoises (Tiantai) et japonaises (Tendai, Nichiren).
- L'enseignement de Vimilakirti (Vimilakirtinirdesa).
- Le Sûtra de l'Ornementation Fleurie (Avatamsaka Sûtra), écriture de référence des écoles Huayan (en Chine) et Kegon (au Japon) ; certaines sections de ce sûtra sont parfois considérées comme des sûtras en elles-mêmes, comme le Soûtra des Dix Terres (Dashabhumikasutra).
- Le Sûtra Shurangama, bien connu des bouddhistes chinois en général et de l'école Chan en particulier.
- Le Sûtra Lankavatara, sutra de référence de la première école Chan.
- Le Sûtra de l'estrade du don de la loi, de Hui Neng.
- Vivre en Bodhisattva (Bodhicharyavatara), de Shântideva.
Branches
- Le mādhyamika, voie médiane, basé sur les enseignements de Nāgārjuna, fut fondé en Inde au IIe siècle. Cette école contredit toute attitude intellectuelle : « Le Vainqueur a dit que la vacuité est l'évacuation complète de toutes les opinions. Quant à ceux qui croient en la vacuité, ceux-là, je les déclare incurables. » 1.
- Le cittamātra, rien qu'esprit, fut fondé par Asaṅga et Vasubhandu au IVe siècle. Il propose un enseignement idéaliste : « l'objet n'existe pas»2.
- La Société du lotus blanc, fondée en 402 en Chine par Huiyuan, est considérée comme la première des écoles de la Terre Pure. Ces écoles vénèrent le Bouddha nommé Amitābha, lumière infinie.
- Bodhidharma, qui vécut aux alentours du VIe siècle, est traditionnellement reconnu comme le fondateur du chan/zen, en Chine.
- Le bouddhisme vajrayāna, véhicule de diamant, apparait aux alentours du VIIe siècle, en Inde.
Conclusion
Longtemps cantonnés dans des espaces géographiques différents, le mahayana et l'école des anciens sont parfois à nouveau en confrontation. Pour le théravada, la primauté historique est un gage d'orthodoxie envers l'enseignement du bouddha, les changements du mahayana étant perçu comme une dénaturation du message originel. Pour les partisans du mahayana,le qualificatif hinayana désigne dans leurs enseignements une spiritualité sèche ou une recherche tourné vers sa seule réalisation personnelle, ce qui selon eux va à l'encontre du but recherché. Au dela des clivages, cette rencontre sera probablement positive pour la compréhension et l'évolution du bouddhisme.