Peinture de lettrés
La première particularité de la peinture lettrée chinoise ou peinture de lettrés 文人画 (wenrenhua), pour l'observateur occidental est qu'elle n'emploie pas de couleurs à l'huile mais est un lavis, le plus souvent monochrome. Elle utilise toutes les possibilités de dilution de l'encre dans l'eau pour atteindre une infinité de nuances. Sur papier ou sur soie, cette technique ignore les lois de la perspective : les effets des lointains et les premiers plans sont rendus par le jeu des proportions.
Qu'il élabore son oeuvre dans le calme de son cabinet, retranscrivant les sensations longuement muries, ou qu'il s'adonne à l'improvisation en présence d'amateurs éclairés, le lettré met toujours à profit sa connaissance de la longue tradition et ne dédaigne pas de travailler "à la manière de...". Il néglige généralement le portrait, ne donnant à l'homme que sa juste place au sein de la nature, et rejette le réalisme. La peinture de paysage et la peinture de fleurs et d'oiseaux sont, avec le bambou, ses sujets de prédilection.
Sous les Qing, la peinture de lettré continue à faire preuves d'une vitalité et d'une originalité remarquables, et beaucoup des plus fameux artistes ne travaillent plus sous aucun maître : c'est le cas des "moines fous", peintres indépendants dont les plus célèbres sont Bada Shanren (1626-1705) et Shitao (1630-1707), et qui ignorent purement et simplement les techniques européennes. Cependant, dans le milieu de la Cour porté à la servilité, le talent et l'indépendance sont parfois difficilement admis, et tel peintre apprécié peut être remercié à tout moment et contraint à retourner dans sa province d'origine.
Devant la prolifération des artistes de talent sous les Ming et les Qing, les historiens chinois tentent de les répartir en écoles : "les Huit excentriques de Yangzhou", les "Quatre Wang"...Au XIXème siècle, l'élan créateur se ralentit et le déclin est constant ; beaucoup de peintres se tournent vers la peinture occidentale et la pratique de l'huile.
