MoZi
Mozi 墨子 vécut de 470 à 391 av. J.-C. en Chine pendant les périodes dites des Printemps et des Automnes et des Royaumes Combattants.
Ses écrits fournissent peu de renseignements sur le personnage bien que certaines anecdotes semblent laisser penser qu'il était originaire d'un milieu d'artisans. Cette extraction relativement modeste a conduit certains historiens marxistes à le considérer comme un penseur prolétarien en opposition par rapport aux penseurs confucéens liés à la noblesse.
Il commencera par adhérer au confucianisme avant de s'en démarquer significativement et de créer sa propre école de pensée dont les thèses se révèleront être une remise en cause à la fois des enseignements confucianiste et taoïste. Loin de se borner à la seule recherche doctrinale, cette école va s'organiser au cours des IVe et IIIe siècles en un mouvement militaro religieux, composé de redresseurs de torts et d'ardents défenseurs de la paix.
L'ouvrage contenant la pensée de Mozi et de ses adeptes place le critère d'utilité au centre de sa démarche. Le seul critère sur base duquel doit finalement être jugée une doctrine est le bien qu'elle apporte au peuple. Ce point de vue amène Mozi à effectuer une charge en règle contre Confucius qui privilégie un point de vue éthique. L'exemple le plus fréquemment cité est celui des rites funéraires que la tradition de piété filiale et la stricte observance des rites préconisées par Confucius rendent extrêmement contraignants. Les mohistes considèrent qu'une période de deuil de trois ans généralement observée lors de la perte d'un parent proche, non seulement nuit à la santé de celui qui le porte mais se révèle également nuisible pour la collectivité étant donné qu'elle constitue un frein à l'activité économique.
Les gouvernants ne sont pas plus épargnés : les dépenses somptuaires de la noblesse, les corvées, les impôts et surtout les guerres sont à proscrire puisque contre-productives et aboutissant à la ruine des États et à la misère du peuple.
L'utilitarisme mohiste poussé à l'extrême mènera à la remise en cause du principe même de plaisir : agir c'est agir dans un but déterminé. Dans ce cadre, les activités artistiques telle que la musique sont problématiques puisqu'elles trouvent en elles-mêmes leur propre justification.
Le concept d'amour universel développé par les mohistes n'est pas similaire à l'amour pour autrui défendu par les confucéens en ce qu'il ne relève pas du sentiment ou de l'émotion mais plutôt d'un soucis d'équité.
Le sens du juste hautement subjectivé par Confucius en ce qu'il s'exprime en situation, laissant l'homme face à son libre arbitre et à son aptitude à la perfectibilité, est battu en brèche par Mozi qui n'a qu'une confiance toute relative dans la nature humaine (sentiment partagé par les légistes). Pour lui, le sens du juste est un concept qui doit s'initier à partir du sommet de la pyramide sociale et redescendre tous les échelons. Dans ce cadre la stricte obéissance à ses supérieurs ainsi que la peur du châtiment deviennent les gages de la stabilité et du contrôle social. Ce principe s'applique bien évidemment au sommet de la hiérarchie, le fils du Ciel tient son sens du juste du Ciel lui-même. Le Ciel retrouve donc chez Mozi une personnalité, une pensée et une volonté ce qui importaient peu pour les Confucéens étant donné que le contrôle de la conduite d'un individu devait plutôt être soumis à la honte de trahir le principe de l'humain plutôt qu'à la crainte de la sanction.