Compagnie de Chine
Contexte
Suivant la trace des Portugais qui sont les premiers à ouvrir la route des Indes et de l'Asie du Sud-Est, des explorateurs, aventuriers et corsaires français voyagent sur des navires armés vers Cathay (Chine) et les Indes pendant le 17ème siècle. Pensant trouver richesse et gloire, ils n'auront pourtant aucun succès commercial probant. Les épices de l'Inde et l'or et les trésors de Cambaluc (Pékin) attiraient pourtant nombre d'expéditions à partir des années 1600. Les premières expéditions commerçantes étaient organisées par des commerçants malouins et dieppois. De multiples compagnies virent le jour bénéficiant de lettres patentes pour un monopole commercial. Les principales sont la Compagnie Le Roy et Godefroy en 1604 qui est devenu la Compagnie des Moluques en 1615 et la Compagnie de Montmorency. Faisant face à la Compagnie hollandaise des Indes orientales, leurs vaisseaux furent systématiquement détruits ou confisqués. Leur impact sur le plan commercial fut alors limité.
L'année 1624 marque le début d'un renouveau dans le commerce vers l'Asie. L'arrivée de Richelieu et la signature d'un traité avec les Pays-Bas, le Traité de Compiègne qui reconnaît la liberté du commerce vers les "Indes occidentales et orientales" relance l'activité des Français en direction de l'Asie. Les deux mots d'ordre sont alors les missions commerciales et l'envoie de missionnaires dans le but d'évangéliser les païens en Asie. La route terrestre est aussi explorée avec les frères capucins du Père Joseph et un missionnaire du nom de Pacifique de Provins a établi des liens officiels entre la Perse et la France. Cela permit à la France d'accéder à la route de l'Inde par le golfe Persique.
Le code Michau sur ordonnance royal en 1629 stimule les Français à créer des compagnies de commerce à l'image des Hollandais et des Anglais.
En 1630, le sud de l'Océan Indien dont notamment Fort-Dauphin et Port-Louis sont prises par les Français qui y installent des comptoirs. Les Français prennent aussi possession des Mascareignes composées des îles Bourbon, île de France, île Rodrigues. En 1642, la Compagnie d'Orient est créée par la lettre patente de juillet 1642 avec monopole de 15 ans sur Madagascar et les îles environnantes.
Cela a permis à d'autres compagnies de reprendre la route des Indes. Les missionnaires sous l'impact du jésuite Alexandre de Rhodes et de la Compagnie du Saint-Sacrement vise en priorité la péninsule indochinoise.
En 1660, enfin est fondée la Compagnie de Chine, avec tous les puissants de l'époque, comme Mazarin ou Fouquet, souvent membres de la Compagnie du Saint Sacrement. Mais celle-ci se consacre exclusivement à des activités commerciales.
La compagnie de Chine
La compagnie de Chine est a été fondé par le Cardinal de Mazarin en 1660 pour envoyer des missionnaires vers l'Extrême Orient tout en faisant du commerce. Cette compagnie avait en main le commerce des mers de Chine. Bénéficiant du savoir faire de différentes compagnies dont les membres ont vécu près de trente et un ans en Asie, cette compagnie avait pour but d'envoyer des missionnaires en Asie dans le but d'évangéliser le plus en Orient. Diverses personnalités de l'époque telles Fouquet ou Mazarin avec des nobles et officiers de la Couronne étaient actionnaires de cette société. Précédant la très célèbre compagnie des Indes Orientales en 1664, la société a été calquée sur la Compagnie néerlandaise des Indes orientales. Ses membres comprenaient aussi des anciens membres ou de très proches de la Compagnie du Saint-Sacrement, des prêtres de l'ordre des lazaristes, des capucins et des dévots.
Les compagnies européennes ultérieures fondées au 17éme siècle ne reprendront pas la vocation religieuse.
A l'époque de Louis XIV, le ministre Colbert a fusionné la Compagnie d'Orient et de Madagascar avec la Compagnie de Chine. Ainsi fut créé la Compagnie des Indes Orientales. Une autre tentative est faite en 1698 avec la fondation de la deuxième Compagnie de Chine.
Les objectifs que donnent Colbert à la Compagnie se révèlent plus vastes que ne le suggère son nom. Ainsi, les mots d'ordre sont : le commerce, évidemment avec en priorité la lutte contre les produits anglais et hollandais. La politique aussi joue un grand rôle car Colbert veut développer la marine nationale en affirmant la présence française sur les mers. Une lutte d'influence s'engage alors entre la Compagnie néerlandaise des Indes Orientales, la Compagnie anglaise des Indes Orientales et la Compagnie française des Indes Orientales qui a englobé la Compagnie de Chine. La propagation de la culture et de la religion en Asie est aussi un des piliers de la Compagnie des Indes Orientales. Elle se donne alors les moyens de partager la civilisation française aux peuples de l'Asie et veut propager la Bonne Parole aux païens en les évangélisant.
En 1669, Colbert crée le port franc de Marseille où les Arméniens s'installent à sa demande. Ces derniers ayant des liens privilégiés avec l'Orient étaient les principaux importateurs d'indiennes, des cotonnades légères et fines, qui plaisent énormément en Europe de par leurs couleurs gaies. Cette installation a aussi pour but d'apprendre les Marseillais à peindre les cotonnades en plus de les approvisionner.
La Compagnie de Chine bien qu'elle ait échoué à créer une véritable colonie sur l'île de Madagascar et à Fort Dauphin en particulier, la compagnie a eu beaucoup plus de succès dans les îles voisines. Les îles voisines de Bourbon et île de France accueillent différents ports et la Compagnie a pendant près de 50 ans le monopole du commerce entre le cap Horn et le cap de Bonne-Espérance.
Mais la guerre de Hollande marque un coup d'arrêt aussi bien au projet de Colbert qu'au fonctionnement de la Compagnie de Chine. En 1682, la compagnie perd son privilège. En 1719, elle est absorbée par la Compagnie fondée par John Law. Au bord de la faillite, John Law la fusionne avec d'autres sociétés de commerce françaises pour former la Compagnie perpétuelle des Indes.
Elle ne retrouvera son autonomie et son indépendance qu'en 1723 mais est englobée dans la compagnie des Indes. La fréquence de bateaux envoyée en Inde est de 10 à 11 bateaux par an sur la période de 1720 à 1770 alors que la période de 1664 à 1719 ne voit que 3 à bateaux par an.
Les produits les plus transportés sont les épices mais surtout les métaux précieux qui représentent plus de la moitié, en valeur, la cargaison d'un navire. Ces métaux furent intégrés et recyclés dans le circuit économique français.