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LEE Sung Yang

© Chine Informations - La Rédaction

Rencontre avec un pionnier de l'entomologie qui a su faire partager sa passion des insectes grâce à un rare talent cinématographique.

LEE Sung YangEntomologiste, Lee Sung-yang 李淳陽 a des vues bien particulières sur les insectes. Ils sont, d'après lui, dotés d'une âme, ressentent des émotions et peuvent faire des opérations d'algèbre simples. Ayant consacré une soixantaine d'années à leur étude, il est persuadé qu'ils peuvent être heureux ou tristes, apprendre, oublier et, en tout cas, accomplir des choses dont seraient incapables des créatures sans âme.

Né en 1922 dans une famille aisée des environs de Chiayi, dans le sud de l'île, il a eu sa première expérience profonde des insectes alors qu'il était encore au lycée, au travers de la lecture d'un ouvrage de Jean-Henri Fabre (1823-1915) intitulé Souvenirs entomologiques. Pour l'entomologiste français, les insectes ne sont pas doués de la raison. Ses travaux les montrent seulement capables d'obéir à des instincts biologiques, sans évolution possible.

Le jeune Lee Sung-yang, qui était alors encore loin de se passionner pour les insectes, doutait déjà de la théorie de l'entomologiste français, un homme qu'il admire par ailleurs. Mais n'ayant pas les connaissances suffisantes, il évita alors de la contester.

Ayant échoué pour des raisons de discrimination ethnique à entrer dans une université taiwanaise - c'était alors la période japonaise -, Lee Sung-yang alla rejoindre son frère au Japon où celui-ci préparait son admission en faculté de médecine. C'est là-bas que, par l'ironie du destin, notre futur entomologiste intégra l'université de Tokyo, en faculté d'agriculture. Plus tard, son diplôme en poche, il retourna dans l'île, y trouvant un poste à l'Institut de recherche agricole de Taiwan où lui confia l'étude des insectes nuisibles.

Sa tâche consistait en leur capture et leur observation, le but étant de mieux connaître les différentes espèces pour empêcher celles qui sont nuisibles de s'attaquer aux récoltes. « Par le biais des insectes, je pensais initialement me consacrer à l'étude des plantes, dit Lee Sung-yang. Mais plus je m'intéressais à eux, plus ils me fascinaient par leur comportement, aiguillonnant ma curiosité ». Il publia alors plusieurs articles dans le Journal de l'entomologie économique, avant d'obtenir en 1961 un doctorat de l'université de Tokyo.

La reconnaissance dans le monde universitaire ne suffisant pas à nourrir quatre enfants, c'est sur les conseils d'un ami qu'il s'essaya au tournage de films commerciaux promouvant des marques étrangères d'insecticides. Ce qui lui fournit l'occasion de mettre en valeur une autre passion, celle de la photographie. Satisfait, son premier client le paya royalement.

L'élément matériel n'étant plus une contrainte, il lui fallait pourtant faire quelque chose d'autre, de plus valorisant comme... un long métrage. C'est l'intérêt suscité en lui par un film documentaire des studios Disney sorti en 1968 et consacré aux insectes du désert qui l'incita à se lancer dans l'aventure. Il voulut alors saisir sur la pellicule tout ce qui faisait l'existence d'un insecte, du début à la fin. Mais filmer dans un environnement naturel, se souvient-il, s'avéra beaucoup plus compliqué que prévu. Problèmes de lumière, d'intempéries...

Il décida alors de faire jouer ses premiers petits acteurs - plus de 200 - en studio, en l'occurrence son laboratoire. Après, ce fut une question de patience. Il fallait parfois attendre plusieurs jours avant de pouvoir prendre certaines scènes. Et puis le coût du documentaire ne cessait d'enfler. D'où la nécessité pour lui de gagner du temps, donc de l'argent, en stimulant les comportements de ses acteurs. Le défi matériel ne fut pas plus facile à relever. Il eut un premier assistant qui démissionna rapidement. Ses enfants vinrent lui prêter main-forte. Le temps passait...

C'est après 8 ans de persévérance que l'œuvre fut achevée : 300 rouleaux de pellicule avaient été nécessaires pour un temps de projection de 2 h. Vos voisins cachés - c'est ainsi que le film fut intitulé - étonna les gens de la BBC à qui il avait été envoyé. Non seulement la prestigieuse chaîne anglaise acheta immédiatement les droits de diffusion, mais en plus elle tourna un autre documentaire sur l'entomologiste génial qui avait produit ce petit bijou - qui plus est, un cinéaste amateur !

En 1976, une émission d'une cinquantaine de minutes combinant les deux films fut diffusée sur la BBC, et ce fut la gloire, les scientifiques comme le grand public s'enthousiasmant pour l'œuvre de Lee Sung-yang. Il se remit au travail et tourna plus tard Evénements cachés, un autre film dédié au monde mystérieux des petites créatures. Cette fois-ci, ce fut au tour des Américains d'être impressionnés, le jury du Festival international de la société photographique américaine lui attribuant son premier Prix.

Toutes ces années d'observations minutieuses ont convaincu l'entomologiste de la nécessité de réviser la théorie de Jean-Henri Fabre sur l'instinct biologique des insectes. Lee Sung-yang a attentivement étudié le comportement de l'Anterhynchium flavomarginatum, une guêpe commune de Taiwan. Il l'observe construire un premier nid avec de la boue, qu'il détruit pour les besoins de l'expérience. La guêpe en fait un autre ailleurs, avec de la boue ramenée du même endroit. Emportant sa charge, elle reprend instinctivement la direction de son premier nid, avant de finalement se souvenir qu'il n'existe plus et de changer de direction pour s'orienter vers le nouveau nid. « La guêpe a oublié, puis s'est souvenue, en déduit l'entomologiste. Oublier puis se remémorer demande beaucoup plus qu'un simple instinct biologique. »

Lee Sung-yang pense que les insectes - certains d'entre eux du moins - sont doués pour les maths. Il a ainsi observé des guêpes délibérément attraper quelques vers de plus pour remplacer ceux que l'entomologiste avait « subtilisés » là où elles les avaient laissés. Il en conclut que certains insectes sont capables d'ajuster leurs stratégies de chasse face aux réactions de leurs proies. « S'il ne suivait que son instinct, l'insecte reproduirait sans cesse le même comportement, malgré l'évolution des circonstances extérieures. Le fait qu'il s'ajuste et s'adapte montre qu'il est capable de penser. »

Plusieurs publications internationales ont repris les articles de Lee Sung-yang sur le sujet qui le passionne. Son obsession des insectes a attiré l'attention de quelques grandes maisons d'édition, l'une d'entre elles publiant un premier recueil de ses écrits en 1981 qui eut un grand succès en raison de ses riches illustrations photographiques.

Cet ouvrage est difficile à trouver aujourd'hui, mais ceux qui l'ont lu ont été intrigués. Christopher Starr, un entomologiste canadien, maître de conférences à l'université des Indes occidentales, à Trinidad et Tobago, a découvert le livre en chinois en 1990 et, après avoir lu l'ébauche de la version anglaise, estime qu'aucun autre travail aussi nouveau sur les insectes n'a été réalisé depuis - justement - les recherches de Jean-Henri Fabre. Malheureusement, l'âge et ses contraintes empêchent désormais Lee Sung-yang de finir la rédaction de l'édition anglaise.

Chao Jung-tai, directeur adjoint de l'Institut de recherche forestière de Taiwan, entomologiste également, estime que les travaux de Lee Sung-yang suggèrent que les insectes ont la capacité de raisonner. Pour autant, dit-il, il s'agit encore d'une théorie qui, aussi intéressante soit-elle, demande à être fondée sur des principes scientifiques.

Les Souvenirs entomologiques de Lee Sung-yang, rédigés il y a une quinzaine d'années lorsque l'âge le lui permettait encore, ont été publiés cette année accompagnés d'un DVD. « Je crois que penser que les insectes sont dotés de raison et mènent une vie très similaire à celle des hommes nous aide à mieux comprendre l'humanité, a écrit Lee Sung-yang dans la préface de son ouvrage. C'est pour cela que j'ai écrit ce livre. »

Taïwan Aujourd'hui

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