16/04/2013 à 11:16 - Le système graphique chinois et l'alphabet
Je ne crois pas que l'on s'éloigne du sujet, François.
Pour répondre à la question, il faut en effet d'abord se souvenir de ce que c'est que l'alphabet. Emprunté par les Grecs aux Phéniciens, l'alphabet a avant tout une fonction phonétique. Si, pour certains linguistes, les "graphèmes", unités minimales de l'écriture, sont tout simplement les lettres de cet alphabet, d'autres considèrent à raison que les graphèmes sont les unités simples ou complexes notant les "phonèmes" (unités minimales de son).
Disons, pour faire simple, que chaque lettre représente un son - voyelle ou consonne -, mais que certains sons peuvent être représentés par différentes lettres comme le son [s] noté "s", "c", "ç", "x" (cf. "dix") ou par une combinaison de deux, voire de trois lettres, comme "ss", "sc" (toujours pour le son [s]), ou encore "au", "eau", "oh", "ho", "aux", "eaux" pour le son [o] par exemple, ceci en fonction de l'étymologie et de l'évolution historique de la langue et de l'orthographe.
A la différence de nos lettres, qui servent essentiellement à noter une seule unité de son totalement indépendante du sens, les caractères chinois notent des syllabes (comprenant un ou deux sons) qui correspondent, le plus souvent, en même temps, à une idée.
Ces caractères peuvent être simples et n'utiliser qu'un seul graphème ou bien complexes et en contenir plusieurs.
Les graphèmes de l'écriture chinoise peuvent avoir :
- une fonction sémantique (pictographique ou idéographique) comme le caractère 馬 [mǎ], devenu 马, et signifiant "cheval" ;
- cette fonction sémantique peut être classificatoire comme celle du composant 女 ("femme")[nǚ] qui est la clef de 妈 [mā] ("mère") ou non classificatoire comme celle du même composant dans 努 [nǔ] ("s'efforcer")
- une fonction phonétique comme le composant 马 dans 妈 mā, "mère" (l'idée de la mère n'ayant rien à voir avec celle du cheval mais les deux mots étant approximativement homophones)
- une fonction graphique comme les deux points qui surmontent l'élément 兄 dans 说 [shuō] ("dire")
Certains de ces graphèmes peuvent jouer plusieurs rôles en même temps, combiner, par exemple la fonction graphique et la fonction sémantique ou la fonction sémantique et la fonction phonétique.
Enfin, de même que nos mots sont composés de plusieurs syllabes, les mots chinois peuvent être mono - ou poly- syllabiques. Mais il y a, là encore, une grande différence entre le chinois et le français puisque les découpages syllabiques, en chinois, correspondent toujours à des découpages sémantiques, ce qui n'est pas le cas en français. Tandis que les syllabes de 火车 [huǒ chē] (littéralement "feu – voiture" = "voiture à feu") collent parfaitement au sens du mot "train" en chinois, celles du mot "débarquement" ("dé - bar – que – ment") ne correspondent pas exactement aux unités minimales de sens de ce terme en français : "dé" (= sortir de) – "barque" (petit bateau) – "ment" (suffixe substantif).
J'espère avoir été claire même si le système graphique chinois est très complexe