Entreprises chinoises : La mentalité MianZi
La complexité de la culture chinoise fait perdre des contrats. On le constate régulièrement et il est important de comprendre les raisons sous-jacentes des incompréhensions. Plus profondes qu'on ne le croit…
Tout d'abord, chacun sait que le privé et le professionnel est beaucoup plus imbriqué en Chine qu'en occident. Certaines multinationales en Chine embauchent des compagnies spécialistes en relations publiques car c'est une bonne pratique en occident et elles pensent que c'est la même chose en Chine surtout si on a pas les compétences sous la main. Mais c'est un bon exemple qui illustre que certaines pratiques ne sont pas transposables.
Prenons l'exemple d'une gestion de crise, la compagnie ne doit pas s'adresser directement à son partenaire en Relation Publique (RP) car ce ne serait pas montrer sa face et ainsi la communication ne serait pas perçue comme sincère. Une meilleure façon serait plutôt de donner l'information directement à la presse qu'elle disséminera ensuite à ses lecteurs. Ceci ne s'applique pas seulement en temps de crise, en temps normal, il ne faudra pas confier toute sa stratégie communication à un seul protagoniste, idéalement l'agence RP pourra construire un réseau national avec les media alors que le top management devra cultiver des relations plus personnelles avec les célébrités, les managers chinois, les membres du gouvernement. Le capital social est incroyablement important, surtout en temps de crise.
‘Mianzi' (面子) désigne la “face” dans le sens de l'apparence, de l'identité sociale et sur la façon qu'une personne sera perçue en société. Il existe deux sens sous-jacents :
Lian (脸) qui est relié à la vertu d'une personne. Le manque de Lian fait que l'individu ne peut exercer ses fonctions dans la communauté.
Mian (面) qui est relié à la personnalité d'une personne, à son prestige ou sa réputation tout du moins, acquise grâce à ses succès.
Le manque de Mianzi apporte la honte ou la disgrâce de la famille, de l'organisation dans lequel l'individu est associé, ainsi que l'individu lui-même. Lorsqu'un chinois a perdu la face, s'ensuit une série d'actions pour la retrouver.
Par exemple, les chinois hésiteront longtemps avant d'engager des procédures judiciaires comme cela a été le cas pour l'affaire des cosmétiques japonais SK II, c'est véritablement que le consommateur du Jianxi a été heurté émotionnellement. De même pour Sony Chine, si le management avait répondu plus rapidement à l'avertissement du bureau commercial du Zhejiang, l'affaire aurait été résolue de façon moins publique.
Une pensée hiérarchique :
Les cinq rôles sociaux confucéens existent encore dans l'inconscient collectif chinois, créant une véritable mentalité respectueuse de la hiérarchie :
1- Du dirigeant au sujet
2- Du père au fils
3- Du mari à la femme
4- Du frère aîné au frère cadet
5- De l'ami âgé à l'ami plus jeune
Même si dans la Chine moderne, la structure confucéenne est moins vraie, elle reste ancrée comme une religion que l'on ne pratiquerait pas mais qui exerce encore une influence. Les individus qui sont dans un haut rang politique ou hiérarchique exercent ainsi une influence considérable sur l'opinion publique. Un chiffre pour l'illustrer : 60% des publicités à la télévision sont sponsorisées par des célébrités.
La mentalité est plus orienté vers le groupe et les relations avec les individus et les ChengYu, citations portions de sagesse chinoises sont un bon révélateur de cette façon de pensée : « l'arme tuera l'oiseau qui dévoilera sa tête dehors » décrit la dynamique de groupe et le peu d'enthousiasme qu'ont les chinois de sortir de la pensée ambiante. Les opinions et les réactions de la société auront une influence très grande dans une prise de décisions : de la famille, des amis proches, de la communauté. Ceci veut dire que corollairement, lorsque quelqu'un émet une mauvaise opinion, les effets sont dévastateurs en très peu de temps.
Dans la lignée de ce qui vient d'être dit, en entreprise, il faudra s'attacher non seulement à motiver les employés mais aussi le groupe, pour atteindre le seuil d'efficacité organisationnelle requis.
Benoît Boisseuil (http://lustintranslation.blogspirit.com)