Salutation,
Je suis un jeune eurasien de 17 ans, en Terminale (enfin, plus pour longtemps). Je pense pouvoir témoigner et partager mon expérience avec vous, notamment pour les parents de jeunes enfants eurasiens. A cause de mon âge, je n'ai pas de beaucoup de recul pour conseiller mais ... mon témoignage vaut mieux que rien. Je ne garantis pas la subjectivité, mais je vais faire de mon mieux.
Ma mère est française et ,ne descend pas d'ancêtres immigrés (on peut donc lui attribuer les traits "français"). Mon père est laotien, lui aussi "pur" souche. Quand la guerre civile éclata au Laos, mon père, alors médecin, immigra en France. Il perdit son diplôme, et recommença ses études. Il est redevenu médecin, et rencontra ma mère peu après. Mes parents vécurent pendant quelques années, mais se séparèrent. J'ai vécu la majorité de ma vie seule avec ma mère plus mon frère et ma soeur. Tout ça pour dire que j'ai été élevé dans un environnement baigné dans la culture et les principes / valeurs morales françaises, et que je ne suis pas imprégné - ou presque - de la culture de mon père. Ce qui fait que je ne corresponds pas à l'Eurasien" moyen.
J'entre dans le vif du sujet, maintenant.
Au niveau de mon apparence, j'ai les cheveux noirs, un peu raides, les yeux marrons foncés, légèrement bridés, un nez comme ma mère, une peau mate mais claire. Je mesure entre 1m77 et 1m80, donc dans la moyenne française mais plus que la moyenne laotienne.
En grandissant, mes caractères asiatiques se sont faits moins prononcés (ma beau a blanchi, mes yeux dé-bridés un peu). Mes caractères asiatiques, notamment mes yeux, m'ont valu la moquerie des enfants pendant l'école primaire. On se moquait beaucoup moins de moi au collège et après. J'ai habitué dans la région parisienne avant de partir vers la Bourgogne (actuellement, je suis en Lorraine, mais je vais faire mes études à Strasbourg, en Alsace, après mon BAC). Je pense que le racisme et les stéréotypes sont plus marqués en Bourgogne et Lorraine. Remarque, c'est tout à fait logique.
Je ne peux pas avoir été victime de racisme ou de discrimination avec mes professeurs. Au contraire, j'avais l'impression d'être apprécié et donner l'impression d'être respecté. Parfois on me désignait comme modèle, surtout pendant l'école primaire où je contrastais énormément avec les autres élèves, plus turbulents,et impulsifs que le moi d'époque. J'ai et je suis un bon ou très bon élève. Ça m'a voulu l'étiquette "d'intello" qui m'a été collé rapidement - et entre autre un peu de jalousie et solitude en plus.
En conclusion, dans le milieu de l'enseignement primaire et secondaire, il n'y a pas beaucoup de soucis à avoir concernant l'intégration des eurasiens (je suis un peu cas à part). Il est quand même important que l'enfant ne soit pas sensible aux moqueries et qu'il se trouve des bons amis. Sinon, il y a un risque qu'il se retrouve isolé rapidement. Dans mon cas, j'ai été amené à devenir mature plus vite que les autres à cause de certaines circonstances (entre autre des responsabilités et des charges que les enfants moyens n'ont pas). Pour être honnête, je trouvais la majorité des autres gamins stupides ce qui ne me donnait pas vraiment envi de me lier avec eux. Avec un peu de recul, c'est juste moi qui était psychologiquement différent. Ça ne m'a pas empêcher d'avoir de bons amis (80% de mes amis sont français, ne venant pas de l'immigration, ce qui prouve que mes caractères asiatiques n'ont pas été un frein à mon intégration). Maintenant, je trouve plus facilement des bons amis. La maturité de mes camarades a atteint un seuil correct depuis, en gros, la Terminale X) C'est plus facile pour moi de trouver des gens qui me correspondent.
La xénophobie envers les Asiatiques, est globalement, très rare et/ou faible. Seules les caricatures et stéréotypes sont répandues, mais ceux-ci n'ont pas de portée méchante. Je pense qu'au contraire les Asiatiques sont perçus comme poli et travailleur. J'ai dans la très grande majorité des cas été partout bien accueilli (à l'école mais aussi ailleurs). Par contre, j'ai ressenti une plus grande xénophobie à l'égard des immigrés venus du Maghreb, notamment. Comme ça ne concerne pas le sujet, je ne vais pas en parler.
Personnellement, immerger l'enfant dans la culture dans ses deux parents me parait être une bonne idée. Le point positif est que l'enfant pourra s'adapter plus facilement à d'autres cultures, sera plus souple et plus ouvert d'esprit. Le point négatif est que l'enfant aura peut être du mal à s'intégrer en France s'il fait ressortir sa culture asiatique. Ainsi, je recommande de ne pas afficher ses traits "moraux" ou "culturels" asiatiques en classe, de façon à ce que ces traits ne font pas passer l'enfant pour "quelqu'un de bizarre" pour les non-asiatique = les français. Au niveau des prénoms, je dirais qu'il faudrait deux prénoms pour l'enfant : un typiquement "européen" et un asiatique. C'est mieux et permet à l'enfant d'avoir l'air plus "français" en France et plus "asiatique" en Asie.
De manière plus générale, pour quelqu'un qui connait les manières françaises, qui parle bien français (avec accent, vous pouvez vous attendre à des moqueries, pas vraiment méchantes, mais humiliantes) et qui n'hésite pas à parler aux autres, l'intégration n'est pas un défi.
D'ailleurs, il y a de plus en plus d'Eurasiens. Ça ne semble pas gêné.
Pour finir, je pense aussi que le mot métis n'est pas péjoratif, néanmoins il est imprécis.
Bonne chances pour les parents !
Dernière édition : 22/05/2011 17h55