Zhuang
Avec une population de quelque 15 millions de personnes, les Zhuang 汉族 forment l'ethnie la plus populeuse de Chine. La plupart de ses membres vivent dans la région autonome zhuang du Guangxi, dans le sud-est de la Chine, province qui couvre à peu près la superficie de la Nouvelle-Zélande. Les autres habitent dans les provinces du Yunnan, du Guangdong, du Guizhou et du Hunan. Il n'y a qu'au Guangxi où les Zhuang vivent en communautés compactes.
La zone d'habitation des Zhuang est sillonnée de plans d'eau qui offrent l'eau nécessaire à l'irrigation, la navigation et l'hydroélectricité. En outre, la zone côtière du Guangxi possède d'importants ports et offrent beaucoup de produits marins, dont d'excellentes perles. Le climat y est doux, avec une température moyenne annuelle de 20 °C. La végétation y est toujours verte et fleurit en toutes saisons. Les précipitations sont abondantes et assurent de bonnes récoltes de riz, de maïs, de canne à sucre, de banane, de longane, de litchi, d'ananas et de mangue. Le sapin et le camphrier poussent généreusement dans les forêts. Les ressources naturelles comprennent, entre autres, du fer, du charbon, de l'or, du cuivre, de l'étain, du manganèse, de l'aluminium, du zinc et du pétrole. La région est également riche en thé, champignons, cannelle et pseudo-ginseng.
Histoire socio-économique
Zhuang est le nom que les ancêtres de cette ethnie se sont donné. Ce mot a été enregistré une première fois, il y a un millénaire, durant la dynastie des Song. Toutefois, les Zhuang utilisaient une dizaine de noms différents.
La région des Zhuang a pour la première fois été sous l'administration des autorités centrales de Chine il y a quelque 2 000 ans. En 221 av. J.-C., Qin Shi Huang, premier empereur à unifier le pays, y a établi trois préfectures. Il y a fait construire le canal Lingqu pour faciliter l'irrigation. Il a également amorcé un programme de déplacement de la population pour renforcer son autorité dans cette partie du pays. Dans les siècles qui suivirent, bon nombre de clans puissants ont émergé dans la région. Même durant les dynasties des Tang et des Song, le développement social et économique y était tel que les rizières, les bestiaux, le filage et le tissage se répandaient largement. Malheureusement, la région des Zhuang tirait toujours de l'arrière par rapport à la Chine du Centre sur le plan économique. Le servage féodal était le système social dominant et les gens étaient classés en trois strates : les propriétaires terriens héréditaires, les paysans locataires et les esclaves. Ce système a été éliminé durant les Qing (1644-1911).
Sur le plan administratif, la grande partie de la région des Zhuang a été régie pendant plus d'un millénaire par le système du chef de clan, soutenu par les autorités centrales, ce qui a donné lieu à de nombreux soulèvements de la part de cette ethnie. Par exemple, en 1851, la révolution des Taiping, le plus important soulèvement paysan de l'histoire chinoise, a éclaté dans cette région. Beaucoup de Zhuang devinrent d'importants dirigeants du royaume céleste des Taiping.
Les Zhuang ont également joué un rôle important dans la défense du territoire du national, étant donné qu'ils habitaient dans le sud du pays. Dans les années 1070, ils ont repoussé des agresseurs d'Annam; au milieu du XVIe siècle, ils ont refoulé des pirates japonais. Vers la fin du XIXe siècle, les troupes françaises qui occupaient le sud du Vietnam firent une incursion au nord et envahirent la Chine. Les Zhuang et les Han du Guangxi formèrent l'Armée de la Bannière noire et refoulèrent les envahisseurs à trois reprises, dont lors de la célèbre victoire de Zhennanguan, à la frontière de la Chine et du Vietnam. Les Zhuang ont également apporté une grande contribution à la révolution de 1911 en aidant Sun Yat-sen à faire avancer sa cause révolutionnaire. Après la fondation du Parti communiste en 1921, des bases révolutionnaires furent installées dans la région des Zhuang. La première organisation du Parti y a été établie en 1925 et, jusqu'en 1949, les Zhuang ont aidé le Parti à triompher.
Les réformes agraires ont commencé immédiatement après la Libération. Par la suite, les Zhuang formèrent des coopératives. En 1952, on commença l'implantation d'une politique d'autonomie régionale; d'abord dans l'ouest du Guangxi, puis dans son ensemble. En 1958, la région fut renommée région autonome zhuang du Guangxi. Peu après, la préfecture autonome zhuang-miao de Wenshan du Yunnan et le district autonome zhuang-yao du Guangdong furent établis.
La région des Zhuang est principalement agricole, mais la sylviculture a également contribué au développement d'une industrie moderne.
Culture
La langue. Elle appartient à la famille des langues sino-tibétaines. D'anciens caractères zhuang sont apparus durant les Song du Sud (1127-1279), mais ils n'ont jamais gagné la faveur. Jusqu'en 1955, les Zhuang utilisaient les caractères chinois, puis avec l'aide du gouvernement, un système d'écriture basé sur l'alphabet romain a été créé.
Art et artisanat. Non seulement ils sont riches et colorés, mais exceptionnels d'authenticité indigène. Par exemple, des fresques remontant à 2000 ans ont été découvertes dans plus de 50 sites le long des précipices de la rivière Zuojiang qui coule dans le sud-ouest du Guangxi. Les plus connues sont les fresques de Huashan qui ont plus de 100 mètres de long et 40 mètres de large et présentent 1 300 dessins. Avec leurs lignes vigoureuses et simples, ces fresques reflètent la vie des ancêtres des Zhuang.
Le tambour en bronze, un vestige typique des ethnies minoritaires de la Chine du Sud, remonte à plus de 2 000 ans. Le Guangxi en recèle à lui seul plus de 500, et tous ont des formes et des motifs différents. Le plus gros a plus d'un mètre de diamètre; le plus lourd pèse plus d'une demi-tonne, alors que le plus léger ne pèse que quelques dizaines de kilogrammes. Le dessus et les côtés sont ornés de motifs en relief.
Jusqu'à maintenant, les explications sur l'usage de ces tambours diffèrent. Certains croient qu'ils servaient à l'exécution de musique militaire, d'autres rétorquent que c'était pour la musique folklorique, alors que d'autres croient qu'ils servaient à des rites religieux ou symbolisaient le pouvoir et la richesse.
Le tissu des Zhuang est un artisanat splendide qui remonte à la dynastie des Tang. Tissé en fil de coton naturel et orné de jolis motifs, il fait d'excellentes couettes, nappes, tabliers et sacs. Il a acquis sa renommée durant les Ming et les Qing (1368-1911) et continue à améliorer sa présentation.
Légendes et ballades. Celles-ci forment le cadre de la littérature populaire qui est réputée pour ses chants. Partout dans la région des Zhuang on peut entendre chanter. On y a recours aux métaphores et aux devinettes pour ajouter de la vie. On dit que, durant les Tang, une chanteuse zhuang appelée Troisième Sœur était connue non seulement en raison de ses chansons mais particulièrement parce qu'elle osait exprimer la cruauté des tyrans locaux. Autrefois, les communautés zhuang tenaient souvent des festivals de chants. À ces occasions, les jeunes se rassemblaient dans leurs plus beaux atours pour se rencontrer et se trouver un partenaire par l'entremise de leurs chants.
Les instruments de musique courants comprennent le suona (cor chinois), le tambour en bronze, la cymbale, le gong, le sheng (instrument à vent), le xiao (flûte droite), le di (flûte traversière) et le huqin (violon chinois) fabriqué avec des os de chevaux.
Les danses zhuang se caractérisent par des thèmes originaux, leur vigueur et des pas agiles, des gestes humoristiques et l'expression d'émotions naturelles. Elles décrivent non seulement la vie des Zhuang, mais aussi leur nature directe et inflexible. Finalement, l'opéra zhuang combine la littérature populaire, la musique, la danse et d'autres formes artistiques qui tirent leur origine des rites religieux des Tang.
Us et coutumes
Habitation. La plupart des Zhuang vivent dans une maison de plain-pied, mais d'autres ont conservé la maison traditionnelle à étages dans laquelle l'étage sert d'habitat et le rez-de-chaussée d'entrepôt et d'étable. Selon ces derniers, l'architecture traditionnelle correspond mieux au terrain montagneux et au climat humide.
Habillement. Règle générale, les Zhuang ont délaissé leur habillement traditionnel, mais celui-ci reste en vogue dans certains endroits ou lors des occasions spéciales. Par exemple, dans le nord-ouest du Guangxi, les femmes âgées aiment les vestes sans col, brodées et boutonnées à gauche qu'elles portent avec un pantalon ample ou une jupe à plis, une ceinture et des chaussures brodées. Elles apprécient les parures en argent. Par ailleurs, les femmes du Sud-Est aiment les vestes sans col boutonnées à gauche, un petit fichu et un pantolon ample, mais de couleur noire unie. Le tatouage est une ancienne coutume zhuang.
Alimentation. Le riz et le maïs constituent l'alimentation de base des Zhuang, et ceux qui demeurent dans le sud apprécient surtout le riz glutineux. Chiquer du bétel est une habitude courante et on en offre aux invités.
Mariage. Les Zhuang sont monogames. Ils avaient toutefois une coutume étrange : la femme ne demeurait pas dans la maison de son mari après le mariage. Lors de la noce, la mariée était emmenée dans la maison du marié par une douzaine de filles de sa génération. Le lendemain, elle retournait vivre dans la maison familiale et elle ne rendait visite à son mari que durant les jours de fête ou durant la saison des travaux des champs. La femme ne déménageait avec son mari que deux ou trois ans après son mariage. Cette coutume qui nuisait à l'harmonie familiale est tombée en désuétude.
Fêtes. Les Zhuang ont certaines fêtes qui leur sont propres : la fête du Diable, la fête de l'Âme du bétail et la fête de la Bombance. La première, qui se célèbre habituellement en août du calendrier grégorien, est la fête la plus importante après la fête du Printemps. Ce jour-là, chaque famille prépare du poulet, du canard et du riz glutineux à cinq couleurs pour les offrir en sacrifice aux ancêtres et aux esprits. La deuxième fête suit le labour du printemps. À cette occasion, chaque famille apporte un panier de riz glutineux à cinq couleurs et de l'herbe fraîche dans l'enclos du bétail. Après un bref rite sacrificiel, elle donne l'herbe à manger au bétail et la moitié du riz. On croit que le bétail a perdu son âme durant la période du labour parce qu'il s'est fait fouetter, et que ce rite la fera revenir. La fête de la Bombance est célébrée seulement par les Zhuang qui demeurent près de la frontière du Vietnam. Selon une légende, des soldats zhuang qui avaient repoussé les envahisseurs français à la fin du XIXe siècle seraient revenus trop tard et auraient manqué la fête du Printemps. Pour les honorer et célébrer leur victoire, leurs voisins auraient préparé une fête somptueuse à leur intention.
Religion. Les Zhuang sont polythéistes et vénèrent, entre autres, les rochers géants, les vieux arbres, les hautes montagnes, le sol, les dragons, les serpents, les oiseaux et les ancêtres. Le taoïsme a aussi exercé une grande influence sur eux depuis la dynastie des Tang. Des missionnaires étrangers sont aussi venus dans la région à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, mais leur influence a été limitée aux villes et aux plus gros villages.