En lisant l'aricle ci-dessous je me demandais si la Chine n'était pas en train de prendre le pas du Japon sur la folie des chiens et chats de compagnie? Qu'en pensez vous? Voyez vous cette tendance se dessinner?
[i]Vous êtes à Tokyo et ressentez le besoin irrépressible de vous procurer un chaton angora à une heure indue ?
La plupart des animaleries étant ouvertes jusqu'à minuit, il vous sera possible de vous acheter des chatons et des chiots à prix d'or. Un chiwawa vous coûtera alors 4 000 euros, tandis qu'un siamois partira à 2 500 euros.
Plus que jamais en 2010, le marché des produits et des accessoires pour animaux de compagnie est en plein essor au Japon. Estimé à 1 137 milliards de yens (environ 10 milliards d'euros), ce marché se traduit par une croissance soutenue depuis quelques années (+3% par an depuis 2002).
De même, les assurances santé animales connaissent une augmentation de leur clientèle depuis à peine un an. En 2007, Anicom est ainsi la première assurance pour animaux légalement autorisée à s'implanter sur le marché japonais. C'est un véritable succès : 280 000 contrats sont signés en 2010, contre 120 000 seulement en 2008.
Chien ou chat, les nouveaux biens de consommation nippone
Le gouvernement japonais est lui-même intervenu pour favoriser la santé des animaux domestiques. Depuis 2000, la fabrication de la nourriture pour animaux est soumise à des contrôles plus stricts : ainsi, l'importation des aliments en boîte bon marché produits en Chine, jugés trop bas de gamme, a été limitée.
Le marché est si juteux que la mafia nippone (les yakuza), qui privilégie traditionnellement les bars à hôtesses et les salles de jeux, a décidé d'y prendre part. Selon les gérants de « pet shops » (animaleries), la mafia en contrôle désormais un grand nombre sur les territoires qu'elle a investis à coup d'acquisitions immobilières, comme Kabukichô ou Ikebukuro, des quartiers de la nuit à Tokyo.
Un substitut affectif à la solitude ?
Selon l'hebdomadaire économique Shukan Toyo Keizai, le nombre d'animaux de compagnie recensés a doublé en quinze ans. L'engouement suscité par les chiens et les chats au Japon est généralement attribué à la dénatalité, au nombre croissant de célibataires et au vieillissement.
En 2010, le gouvernement japonais recensait seulement 1,6 million de naissances contre plus de 22,3 millions d'adoptions d'animaux.
Hanae, une jeune cadre trentenaire vivant à Tokyo, assume complètement ce choix de substitution à la procréation :
« Fonder une famille me semble beaucoup trop contraignant. Pouvoir donner de l'affection à un chat me satisfait pleinement. Je n'ai ni besoin d'enfant, ni de mari. »
Compte tenu de l'indice de fécondité avoisinant 1,2 enfant par femme en 2010, un des plus faibles au monde, ces animaux semblent ainsi servir de substituts aux enfants. Désormais, le chat ou le chien est un membre à part entière de la famille.
Les animaux de compagnie viennent avant les enfants
Odaiba, l'île artificielle dans la baie de Tokyo, fait partie de ces quartiers qui réunissent la majorité des passionnés d'animaux domestiques. De l'acupuncture au massage canin en passant par l'aromathérapie, les offres dédiées au bien-être animal se sont largement développées.
Au milieu des bars à chats, des centres de location de chien à l'heure et du « Dog petit resort », un onsen (bain thermal) canin ouvert en mars 2010, se trouve Pet City, un immense supermarché entièrement dédié à l'animal de compagnie. Cet espace, dont le slogan est « Pets come first » (les animaux de compagnie sont prioritaires) est dirigé par Yukiko Kuroda.
Depuis son ouverture il y a dix ans, cette dernière note une évolution de sa clientèle :
« Aujourd'hui, des clients réguliers n'hésitent plus à acheter pour plus 100 000 yens (900 euros) mensuels d'accessoires et de nourriture. Depuis environ un an, l'évolution des clients de Pet City est surprenante : pour la majorité, il s'agit de couples sans enfants ou de célibataires qui considèrent leurs animaux comme de véritables enfants. »
Hara Tomomi, une jeune employée de Pet City, estime elle-même qu'elle n'est pas faite pour une vie de famille. Elle préfère continuer à vivre sa vie « indépendante, sans homme ni enfant, entourée de [ses] 30 chats et de mes trois chiens », dans sa grande maison située en banlieue de Tokyo. Son rêve ? « Avoir les moyens d'acheter les accessoires que je vends actuellement pour faire le bonheur de mes propres animaux. »
Toilettage, accessoires, vétérinaire : près de 200 euros par mois
L'animal devient donc le centre de toutes les attentions. D'après les dernières enquêtes menées en 2010 par l'hebdomadaire nippon Shukan Toyo Keizai, 61% des Japonais ont déjà un chien ou souhaitent en adopter un dans l'année à venir, tandis que 36% d'entre eux ont déjà un chat ou envisagent l'adoption dans l'année à venir. Enfin, 59% considèrent que l'animal adopté est un membre de la famille.
C'est notamment le cas d'Ayomi, une des nombreuses clientes de Pet City qui promènent leurs chiens en poussette. Elle déclare dépenser environ 20 000 yen (185 euros) par mois pour son chien prénommé Kotsubu et confesse que si ces achats mensuels sont parfois frénétiques, ils lui semblent tout autant nécessaires que les soins apportés aux enfants :
« Ils comprennent les vêtements, les accessoires, la nourriture, le toilettage et les soins vétérinaires. C'est indispensable pour le bien-être de Kotsubu et pour moi-même. »
Elle ajoute :
« Je promène mon chien en poussette car c'est plus confortable pour lui : quand le sol est trop chaud par exemple, cela lui évite de se brûler les pattes. »
Le chat et le chien sont « kawai »
L'animal est partie prenante de la culture « kawai », un terme omniprésent au Japon, qui représente un canon esthétique basé sur le monde de l'enfance mignon et doux. Ce critère, largement utilisé dans le marketing japonais, s'est ainsi transposé sur le marché des animaux. Les bébés animaux sont particulièrement adulés.
Midori, la directrice du Chamamo Cafe (bar à chats) dans le quartier de Harajuku à Tokyo, insiste sur cet aspect
« Même si beaucoup de Japonais ont tendance à considérer les animaux de compagnie comme des biens de consommation, l'aspect “kawai” des chats a le mérite de leur transmettre de la gaieté et de la sérénité. Des personnes se sentent alors moins seules. »
Mais le manque d'espace et l'interdiction de garder un animal dans les appartements loués alimentent la frustration de certains Japonais, qui aimeraient avoir accès à ces nouveaux « biens » de consommation. Pour eux, la solution se trouve alors dans la location d'animaux à temps partiel.[/i]
Source : Rue 89