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Néo-agriculteurs : fer de lance de la revitalisation rurale

© Chine Nouvelle (Xinhua) - Ju Yinhe, Le 05/10/2023 10:26

Alors que la revitalisation rurale bat son plein en Chine, la campagne de Chongqing voit l?arrivée de plus en plus de talents avec des capitaux et de la technologie en vue de développer des industries caractéristiques. Cela a permis à de nombreux agriculteurs traditionnels d?élargir leurs horizons professionnels et de devenir des « néo-agriculteurs », qui forment un fer de lance du développement des industries rurales.

Le développement aux pieds des théiers

En 2000, Liu Yi, qui travaillait dans un point de vente de céréales dans le district de Xiushan, a été mis à pied en raison de la restructuration de son entreprise. Il a dû s?essayer à d?autres métiers allant de routier à entrepreneur de construction. Lors doeune conversation avec des amis, ils ont abordé la politique de soutien aux industries rurales et la perspective de l?industrie du thé. Ils ont tous été convaincus qu?avec l?amélioration du niveau de vie et l?accroissement de la consommation du thé haut de gamme, cette industrie serait prometteuse avec une forte valeur ajoutée.

En 2010, Liu Yi et ses amis se sont rendus dans le canton de Hong?an pour explorer le modèle de plantation, et l?année suivante, ils ont créé l?entreprise de thé Chongqing Bianchengyun. « Il n?y avait pas d?industrie du thé ici auparavant, nous avons loué 800 mu (53,3 ha, ndlr) de terres au prix de 260 yuans par mu comme base de production expérimentale pour promouvoir la théiculture locale, explique M. Liu, les producteurs de thé n?ont pas à se préoccuper de la vente, nous leur achetons en gros aux prix de la saison et revendons. » En plus du fermage, les villageois peuvent cultiver et cueillir du thé pour l?entreprise de Liu Yi, et gagner 100 à 200 yuans de revenus supplémentaires par jour.

À ses débuts, l?entreprise a rencontré bien des difficultés dans ses ventes à cause de sa marque peu connue et peu considérée. Afin de forger une image digne de confiance pour le thé de Hong?an, en plus des améliorations apportées aux niveaux de la plantation, des techniques de transformation et du contrôle qualité, M. Liu a emmené ses produits à divers concours et expositions. Son thé vert maojian et son thé noir de la marque Bianchengyun ont remporté plusieurs prix nationaux en 2023.

Aujourd?hui, les ventes annuelles de l?entreprise dépassent les 12 millions de yuans. Selon Liu Yi, l?agroalimentaire nécessite un investissement initial important et une longue période de retour sur investissement, et il faut supporter l?attente. Tout le long de sa croissance, l?entreprise a bénéficié de politiques de soutien et coopéré avec le collectif villageois pour multiplier les canaux de vente de thé. Elle s?est déclarée vouloir continuer à développer vigoureusement l?industrie du thé, en encourageant les agriculteurs locaux à augmenter les revenus.

Le bonheur de fil en aiguille

La broderie de l?ethnie miao du district de Youyang a une longue histoire et fait partie du patrimoine culturel immatériel (PCI) de Chongqing. D?ailleurs, elle s?offre souvent en présent aux invités étrangers de la municipalité.

Aujourd?hui 52 ans, la brodeuse Tian Sumei, du canton de Chetian de Youyang, enseigne la broderie traditionnelle miao dans le village de Hejiayan. Autrefois loeun des 18 cantons les plus pauvres de Chongqing, Chetian souffrait de ses infrastructures de transport en piteux état et manquait d?industries caractéristiques permettant à ses habitants de sortir de la pauvreté. En 2017, Chen Guotao, une héritière du PCI de la broderie miao de Youyang, a créé un atelier de lutte contre la pauvreté dans le canton pour transmettre gratuitement son savoir-faire à des femmes, ce qui a suscité un grand intérêt chez Tian Sumei.

Influencée par son environnement familial, Mme Tian, capable de broder des robes depuis son adolescence, a toujours aimé la broderie. « Après avoir rejoint l?atelier, j?ai appris plus de techniques avec Mme Chen et ses amis », confie-t-elle. Aujourd?hui, elle excelle tant dans les petites pièces comme les mouchoirs ou les feuilles d?éventail que dans les grandes comme les paravents, les vêtements et les dessus de couverture.

En 2021, Chen Guotao a installé son atelier dans le village de Hejiayan et Tian Sumei l?a suivie. En dehors de son temps de création, Mme Tian enseigne ses compétences et son expérience aux brodeuses du village. « Les débutantes ne sont pas capables de réaliser des oeuvres complexes, alors elles commencent par broder de petits accessoires. La confection de chaque pièce revient à 0,6 yuan. Elles peuvent se familiariser avec les techniques tout en gagnant au moins 50 ou 60 yuans par jour », partage Mme Tian. « J?aime broder des fleurs et des oiseaux sur mes vêtements depuis mon jeune âge. Aujourd?hui, je peux faire ce que j?aime tous les jours et gagner de l?argent avec. Mon mari et moi gagnons environ 6 000 yuans par mois, sans grosse dépense dans le village et l?atelier. Je suis très satisfaite doeune telle vie », se réjouit-elle.

Le crabe qui « rit »

Originaire de la ville de Nantong, dans la province du Jiangsu, Shen Zhongbin a plus de 30 ans d?expérience dans l?élevage du crabe d?eau douce. Il a développé cette aquaculture dans treize villes et préfectures de la province du Yunnan, aidant plus de 200 éleveurs, ainsi que des entreprises et des coopératives d?élevage, à augmenter leur production et leurs revenus.

Il y a trois ans, M. Shen a été invité au village de Dahan du canton de Heishui dans le district de Youyang, pour fournir un soutien technique au parc d?élevage de crabes de rizière de Dongying. « L?eau pour l?élevage de crabes ici est l?eau de source de montagne, elle est relativement pauvre en nutriments, il faut semer une proportion convenable d?algues. Les variétés de crabe Changjiang n° 1 et n° 2, qui ont une croissance rapide, un bon goût et une bonne résistance aux maladies, conviennent très bien au parc d?élevage de crabes de rizière. »

Selon Guo Jing, maire du canton de Heishui, la formation d?équipes techniques et l?invitation régulière d?experts ont permis de résoudre une série de problèmes en matière de stockage de l?eau et d?alimentation des crustacés. « Les crabes poilus alpins élevés dans cet environnement avec ces méthodes d?alimentation scientifiques ont une teneur élevée en sélénium et une chair succulente. L?année dernière, nous avons mélangé des crabes poilus de différents terroirs avec ceux de Youyang et invité des experts à une dégustation à l?aveugle. Ils ont tous pu discerner les différences. »

En ce mois de septembre, les crabes poilus du parc d?élevage de Dongying vont entrer sur le marché. Guo Jing, déjà en contact avec des plateformes de commerce électronique et de logistique, a l?intime conviction que les crabes poilus alpins de Youyang peuvent devenir une industrie prometteuse permettant aux habitants locaux de s?enrichir.

La fabrique de talents

En pleine revitalisation, les différentes régions rurales du pays se voient confrontées à un défi commun : le manque de talents. La réalité veut qu?elles peinent à attirer la matière grise, une exploitation endogène est donc de rigueur.

L?Institut professionnel du tourisme de Chongqing, situé dans l?arrondissement de Qianjiang, regroupe 31 spécialités liées au tourisme en partenariat avec treize provinces et municipalités, dont Chongqing. Il se charge également de projets de formation professionnelle développés par le gouvernement pour réduire la pauvreté, tels que la formation de 500 conducteurs de chariots élévateurs chaque année. Il a par ailleurs mis en place un centre d?héritage et d?innovation de l?artisanat ethnique, qui comporte onze ateliers pour la broderie, le brocart, la teinture par nouage, le batik, l?art du thé, l?art de la laque, l?estampe du Nouvel An, la fabrication des bijoux, entre autres. Dix maîtres artisans y professent leur savoir-faire en personne.

L?institut se trouve dans une agglomération où les minorités ethniques représentent 70 % de la population, ce qui est propice à l?enseignement des cultures traditionnelles, selon le doyen Tan Jiancheng. Mais ces dernières années, pour répondre à la transition industrielle, son institut tâche de joindre l?éducation et le monde du travail.

« L?objectif principal est de permettre à nos diplômés d?avoir une bonne connaissance des cultures traditionnelles », éclaire M. Tan, avant de souligner que dans la région sud-est de Chongqing, l?intégration de la culture et du tourisme est une pièce maîtresse de la revitalisation rurale. Ses étudiants sont plébiscités par le marché du travail, des agences de voyage aux entreprises de création culturelle en passant par les attractions touristiques. « Rien qu?à Qianjiang, il y a une centaine de professionnels du tourisme qui sont diplômés de notre institut, dont ceux qui ont suivi une formation sur commande du Groupe de tourisme et d?investissement de Qianjiang. »

Dans un des ateliers de l?institut, Xu Jiahui, l?héritier représentatif de l?estampe du Nouvel An de Liangping, déclare qu?à l?heure actuelle, la conscience de la jeune génération d?hériters de la culture traditionnelle doit être renforcée. La production doeune estampe du Nouvel An commence par la gravure sur bois et nécessite au moins 30 étapes. Mais de nos jours, les jeunes sont rarement disposés à exercer ce métier.

Afin d?assurer un enseignement holistique des cultures traditionnelles, les ateliers sont ouverts à tous les étudiants, qui sont libres de choisir les cours, selon M. Tan. Pour lui, la maîtrise des cultures traditionnelles pourrait devenir un avantage unique de ses étudiants à l?embauche, et leur transmission permet de favoriser la revitalisation rurale.

Aux yeux de M. Tan, la revitalisation rurale et les mesures innovantes des instituts professionnels relatives à la formation du personnel qualifié sont indissociables, et il est nécessaire de construire une plateforme d?éducation collaborative entre gouvernement, instituts professionnels et entreprises. Il plaide pour un enseignement qui, tout en améliorant le niveau théorique des étudiants, cible davantage la revitalisation rurale et réponde aux besoins de la société. Fin

(Source?La Chine au prése

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