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Opéra de Pékin

© Chine Informations - La Rédaction

(miniature) Opéra de Pékin Opéra de Pékin

L'opéra de Pékin 京剧 est un art traditionnel chinois. Il est entré sur la liste du Patrimoine culturel immatériel de l'humanité de l'UNESCO en 2010.

Introduction

Dans cet art, l'expression dramatique est hautement stylisée et esthétique, mais le public souhaite toujours retrouver des personnages idéalisés et une fin heureuse.

Dans l'esthétique chinoise traditionnelle, il existe une appréciation réelle et virtuelle de la beauté. La première est la réponse émotive à la beauté telle qu'elle est perçue par la vue, l'ouïe et l'odorat; la seconde est l'appréciation esthétique enrichie par l'imagination. L'esthétique intangible est porteuse d'une plus grande signification.

Le concept chinois de la beauté se manifeste dans les concepts de Laozi, un contemporain de Confucius (551–479 av. J.-C.) et, sans contredit, le philosophe le plus influent de la Chine. Pour lui, la quête de la connaissance humaine dans le monde changeant était une vocation sans fin. Dans le Dao de jing, il a écrit : « Un grand bruit est difficile à entendre, une grande forme n'a aucun modelé », ce qui signifie que la véritable beauté et la vraie grandeur existent dans l'esprit plutôt que dans l'espace-temps.

Les générations de lettrés chinois ont donné la préséance aux quêtes spirituelles, une prédisposition que l'on retrouve dans le monde chinois des arts. Les anciens poètes, peintres et musiciens aspiraient à exercer un effet spirituel sublime sur les esthètes les plus perspicaces — ceux qui admiraient une peinture parce qu'ils avaient compris l'esprit dans lequel elle avait été créée. Cette approche est illustrée par la technique de peinture au pinceau appelée xieyi -- un style à main levée qui capte l'esprit du sujet et exprime l'impression du peintre sur ce propos, contrairement à la technique méticuleuse du gongbi qui la reproduit fidèlement. De la même manière, l'appréciation esthétique d'une poésie était basée sur la connaissance de la prétention du poète. L'opéra de Pékin est un aspect de l'esthétique chinoise traditionnelle.

Une esthétique nourrie par la tradition

Le vaste répertoire de l'opéra de Pékin se compose de thèmes adaptés de l'histoire, de légendes et de mythes. Le Dictionnaire des pièces de l'opéra de Pékin en dresse plus de 5000, dont 1 000 sont encore présentées. La gamme des personnages compte des mortels, des dieux, des fantômes et des démons. Mis en scène selon des concepts et des conventions esthétiques traditionnels, l'opéra de Pékin a une portée illimitée pour ce qui est de l'usage imaginatif de l'espace de représentation limité.

Les accessoires comportent généralement une table et deux chaises, alors que le temps et la mise en scène de l'intrigue sont ordonnés selon des conventions théâtrales. Par exemple, le fait qu'un mari et sa femme soient assis sur deux chaises et en train de bavarder signifie qu'ils sont dans leur salon. Si un pichet de vin et deux gobelets sont posés sur la table, cela signifie qu'ils sont plutôt dans la salle à manger. S'il y a des livres sur la table, ils sont dans la salle d'étude. L'action de quitter une pièce ou d'ouvrir et de fermer des portes est mimée. Quand le rideau tombe, cachant la table et les chaises, la pièce disparaît et le scénario change. Quand un interprète marche sur une scène vide, il est en réalité dans une rue commerciale animée ou dans une campagne inhabitée éloignée, soit pendant la journée ou la nuit. Quand le rideau se lève et révèle la même table et les mêmes chaises, le personnage de la pièce est retourné à la maison ou est en visite dans la maison d'un ami. Si ces objets quotidiens d'ameublement ont des couvertures en soie jaune, l'intrigue s'est déplacée dans le palais impérial ou dans la résidence d'un prince.

L'ensemble standard de table et chaises est étonnamment polyvalent. Par exemple, placer une chaise sur une autre représente un bâtiment élevé ou une plateforme, alors que placer une chaise sur une table symbolise une montagne ou un plateau élevé. Quand une chaise est drapée d'un morceau de soie, elle se transforme en métier à tisser. C'est ce qui pourrait être appelé la gestion « virtuelle » de la scène et est inspiré de la technique du pinceau à main levée appelée xieyi, laquelle brise les limites de la nécessité de se confiner à la ressemblance formelle par l'utilisation d'éléments symboliques de la vie quotidienne pour créer un contexte par la suggestion.

Monter à cheval est une action qui est souvent dépeinte dans l'opéra de Pékin, et elle se manifeste par un acteur qui tient un fouet fabriqué d'un bambou court ou d'un bâton en bois auquel sont attachées trois ou cinq bandes de pompons colorés. Monter et descendre du cheval, l'attacher, de même que l'attacher et le faire courir sont exprimés par un mime qui est immédiatement compréhensible, que les membres de l'assistance aient ou non l'expérience de l'équitation.

Ce principe de « virtualisation » a brisé les limitations d'espace-temps de l'opéra de Pékin et a rendu la mise en scène simple et éloquente. Des bannières bleu pâle qui ondulent vigoureusement transforment la scène en océan, et l'arrangement de quelques nuages simulés en fait un palais céleste. Quand un acteur place un morceau de gaze noire ou blanche sur sa tête, cela signifie qu'il est entré en enfer, et lorsqu'il est flanqué de deux bannières portant le motif d'une roue, il conduit un char tiré par des chevaux. Lorsqu'un acteur se balance légèrement et tient un aviron, cela veut dire qu'il rame sur un lac ou une rivière. Quand il lève une main pour couvrir sa tête, il marche sous une forte pluie; quand il replie les bras et frissonne, il est dans un monde de glace et de neige. Faire le tour de la scène peut signifier marcher le long d'une ruelle étroite ou parcourir 1000 km, et huit soldats peuvent représenter une légion de dizaines de milliers. Cette approche laisse une place énorme à l'expression artistique sur scène.

Virtuelles ou pas, les techniques théâtrales de l'opéra de Pékin sont basées sur la vraie vie et exécutées selon des conventions éprouvées. Il y a des « mouvements standards » pour les actions de s'asseoir, de se reposer, de marcher, de courir, d'ouvrir et de fermer des portes, de monter à cheval, de ramer, de marcher et de combattre. Comme il n'y a aucune porte sur la scène, ouvrir une porte de la façon consacrée dépend entièrement de la compétence en mime de l'acteur. Il utilise une main pour pousser la porte, l'autre pour retirer le verrou et les deux mains pour pousser les deux battants, tout en faisant un pas de côté. Dans la Chine antique, la plupart des portes avaient deux battants avec un verrou intérieur et un fermoir de serrure à l'extérieur. C'est la base sur laquelle s'appuie le mime standard de l'opéra de Pékin pour ouvrir une porte. La séquence des gestes est réglée, immuable et applicable à tous les types de ménages dépeints, qu'ils soient riches ou pauvres.

La forme artistique des esthètes

Opéra de Pékin

Les perspectives esthétiques peuvent changer, mais toutes sont en quête de beauté. L'opéra de Pékin est la forme artistique des esthètes.

Dans l'opéra de Pékin Su San Qi Jie (Su San obligée de porter un carcan), l'héroïne est Su San, une prostituée avenante et au bon cœur. Elle est emprisonnée pour un crime qu'elle n'a pas commis et envoyée sous escorte dans la capitale provinciale pour subir un procès. Bien que prisonnière, Su San, vêtue d'une longue robe rouge ajustée — le « vêtement du prisonnier » dans l'opéra de Pékin — semble avoir l'esprit enjoué. L'aspect unique de cet opéra est que le carcan de Su San est davantage un ornement qu'une punition, étant rouge et décoré du motif de deux poissons, deux signes de bon augure. Ce stratagème dépeint efficacement Su San comme un personnage sympathique méritant un destin heureux.

Un autre point culminant de l'opéra de Pékin, la pièce Se précipiter la tête contre une stèle en pierre, est basée sur le général bien connu Yang Jiye de la dynastie des Song du Nord (950-1127). Dans cette pièce, Yang Jiye combat bravement les envahisseurs Liao, mais il est encadré par des ministres déloyaux et est forcé de mettre fin à ses jours. Aimant mieux mourir que de se rendre, il se suicide en se frappant la tête contre une stèle en pierre. Avant d'être amené à poser ce geste, Yang Jiye combat pendant plusieurs jours sans manger et sans dormir, et pendant ce temps, tous ses soldats, sauf dix environ, sont tués. Même lorsqu'il affronte la mort, Yang Jiye a une conduite qui est en tout point celle d'un général, et afin de manifester son état d'esprit dans cette situation, un dispositif spécifique de costume est employé : enlever l'armure de l'avant-bras du général. Dans les conventions strictes de l'opéra de Pékin, l'enlèvement d'une pièce d'armure indique que le personnage est dans une situation anormale. C'est un dispositif qui honore l'intrigue, tout en maintenant l'intégrité visuelle du héros.

Dans l'opéra de Pékin, chaque chose et chaque personne possède un attrait esthétique : aucune place pour le réalisme grossier. Les mendiants sont propres et bien mis, et leurs vêtements sont rapiécés en différentes couleurs. Dans une scène de bataille, le public voit le reflet et l'éclat des poignards et des épées sur la scène et entend rouler les tambours de bataille, mais on ne simule pas la perte d'une seule goutte de sang. Quand un soldat est tué au cours d'une bataille, il tombe simplement par terre avant de se relever et de courir vers l'arrière-scène. Dans l'opéra de Pékin, une scène de bataille est simplement une occasion fascinante d'assister à une démonstration d'acrobaties et d'arts martiaux. Dans La concubine est éméchée, Dame Yang est ivre, mais elle danse avec une grâce émouvante. Le maître d'opéra de Pékin Mei Lanfang, qui a été célèbre pour sa présentation de Dame Yang, a dit un jour que les amateurs de théâtre achètent des billets d'opéra de Pékin parce qu'ils veulent voir des intrigues plaisantes et être transportés par la compétence d'exécution des acteurs. En d'autres termes, l'opéra de Pékin est un passe-temps entièrement agréable au sein duquel règne l'esthétisme.

Unité de la beauté intrinsèque et superficielle

Dans l'opéra de Pékin, l'accent esthétique est mis sur la beauté intrinsèque plutôt que sur la beauté superficielle.

Les airs de l'opéra de Pékin font l'éloge de personnes intègres et ayant des idéaux, comme les ministres fidèles, les fils respectueux, les fonctionnaires honnêtes et justes, les hommes chevaleresques prêts à défendre les faibles et les sans défense, les gens du commun qui prennent plaisir à aider les indigents, et même les fantômes et les démons qui font preuve de bonté. Du même coup, l'opéra fait la satire des empereurs tyranniques, des ministres déloyaux, des fonctionnaires corrompus, de ceux qui sacrifient tout pour le bénéfice, des bandits et des criminels. Les pièces ont généralement une fin heureuse où la vertu triomphe du mal.

Un sac de bijoux fournit une histoire est une pièce du répertoire de l'opéra de Pékin connue de beaucoup d'amateurs, à tel point que la plupart de ceux-ci peuvent réciter de mémoire les répliques des interprètes. Pourtant, chaque fois que la pièce est présentée, le théâtre est bondé, car les amateurs d'opéra de Pékin ne se lassent jamais des beaux airs, des répliques poétiques et de l'intrigue captivante.

La pièce raconte l'histoire de Xue Xiangling, une femme issue d'une famille riche, et de Zhao Shouzhen, une femme d'une famille pauvre, qui se marient le même jour. Elles se rencontrent, au moment où elles se protègent de la pluie en chemin vers leur cérémonie de mariage respective. Zhao Shouzhen est assise dans son fauteuil à porteurs et déplore sa pauvreté et sa misère, ainsi que la manière dont le monde regarde de haut les moins fortunés. Xue Xiangling demande à sa servante de découvrir qui pleure et pourquoi il en est ainsi, et en entendant l'histoire de Zhao Shouzhen, elle lui donne immédiatement et de façon anonyme un sac de bijoux. Le sac est décoré d'un motif brodé de qilin (licorne chinoise). Quand la pluie s'arrête, chaque mariée va son chemin. Six ans plus tard, une inondation appauvrit la famille de Xue, et Xue Xiangling est confinée dans une terre étrange et éloignée de sa famille. Une famille riche la recueille et la prend comme domestique.

Puis, un jour, Xue Xiangling trouve son sac de bijoux, orné du qilin brodé, dans un bâtiment situé dans le jardin arrière ; elle en est émue aux larmes. La maîtresse de maison entend parler de cette nouvelle et découvre par la suite que sa domestique n'est nulle autre que la personne qui lui a donné les bijoux qui l'ont libérée de la pauvreté. Elle élève immédiatement le statut de Xue Xiangling à celui d'hôte distinguée. À ce moment-là, le mari de Xue, son fils et des membres de sa famille élargie arrivent à la maison de Zhao, et la famille entière est réunie. Cette quasi-tragédie donne à Xue Xiangling une attitude plus positive envers la vie. Zhao Shouzhen et Xue Xiangling deviennent des sœurs à la vie à la mort, et les deux familles commencent une nouvelle existence dans le bonheur.

Il y a toujours des applaudissements bien nourris à la fin de cette représentation. Ceux-ci expriment l'appréciation du public envers les interprètes et leur respect pour les personnages de Xue Xiangling et de Zhao Shouzhen. Ils manifestent également le souhait collectif que la vie puisse imiter l'art. Les personnages idéalisés et une fin heureuse, voilà ce que le public de l'opéra de Pékin attend de cette forme d'expression dramatique hautement stylisée et esthétique.

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