11/07/2009 à 10:14 - Lecture ethnique ou lecture politique
Vous avez raison de le souligner, Stardust, toute lecture « ethnique » des conflits politiques est très réductrice. Elle participe d'une idéologie biologisante très suspecte qui tend chez nous à envahir jusqu'au vocabulaire courant : on parle de plus en plus de telle ou telle tendance « inscrite dans l'ADN » ou « dans le code génétique » de tel individu ou de telle entreprise ! C'est dangereux et stupide.
En matière politique, je crois que les seules questions qui vaillent sont des questions politiques : en l'occurrence, la question est de savoir si la manière dont le gouvernement central de Chine traite les « minorités » est juste ou non. A l'évidence, dans l'affaire du Xinjiang, les Ouigours ont quelques raisons de se sentir discriminés en matière d'accession aux postes de responsabilité, en matière de formation, en termes de conditions de travail et de niveau de vie et en termes de protection judiciaire... Cela ne signifie pas, évidemment, que les Ouigours sont exempts de toute responsabilité dans les récents événements ou qu'ils sont toujours, en tant que tels, du côté des victimes.
Vous parlez de « volonté politique », vous avez parfaitement raison mais je ne crois pas que les problèmes se résoudront pour autant d'eux-mêmes.
Si, comme cela est sinon avéré, du moins probable, le gouvernement chinois tente d'instrumentaliser les fractures religieuses existantes pour faire l'amalgame entre revendications séparatistes et terrorisme islamiste, il risque de faire la politique du pire et de creuser plus encore l'écart entre les « Hans » ou ceux qui ont le sentiment d'appartenir à cette entité ethnique plus ou moins mythique d'une part et les Ouigours d'autre part au risque de susciter ainsi lui-même l'extrémisme contre lequel il prétend lutter.
En pointant par ailleurs du doigt l'Amérique derrière les émeutes du Xinjiang, le PCC peut bien sans doute susciter un réflexe nationaliste de la part de l'opinion publique chinoise, comme cela s'est vu en partie lors des Jeux olympiques, mais il ne fera que retarder ainsi les solutions politiques seules susceptibles de résoudre la crise et d'apaiser les tensions entre les uns et les autres.
Il semble que le PCC n'ait pas sur ces questions une vue unanime. Comme dans les événements de la place Tian'anmen, il semble que les uns soient partisans d'un dialogue quand d'autres n'entendent que la politique du bâton. Espérons que les premiers sauront se faire entendre...