Yangzhou
Située sur la rive nord du fleuve bleu (ou fleuve Yangzi), à l'intersection avec le Grand Canal qui relie Hangzhou (capitale de la province du Zhejiang) à Pékin, la ville de Yangzhou 扬州 occupe une situation stratégique au centre du bassin inférieur du Yangzi, région en fort développement. Elle est reliée par autoroute à Shanghai (300 Km) et à Nankin (100 Km). Le territoire administratif de la municipalité de Yangzhou couvre une superficie totale de 6 638 Km2 (soit à peu près la superficie moyenne d'un département français), pour une population de 4,5 millions d'habitants, la ville de Yangzhou elle-même regroupant 480 000 habitants. Yangzhou est la ville natale du Président Jiang Zemin.
Cette localisation privilégiée au coeur de la Chine du riz et à la conjonction des voies de communication terrestres et fluviales, a conféré à la ville un rôle important dans l'histoire politique, économique et culturelle de la Chine. L'histoire de Yangzhou se confond, à bien des égards, avec les développements de l'histoire du pays, alternant périodes d'apogée et de crise. Les premières traces historiques de la ville remontent à plus de 2500 ans, à l'époque dite des "Royaumes combattants". Sous la dynastie des Han (206 B.C.-220 A.D.), Yangzhou, alors dénommée Guanglin, est la capitale du royaume de Wu. L'empereur Yangdi de la dynastie des Sui (581Ó618 A.D.), qui ordonna la construction du Grand Canal (587-608) reliant le fleuve Yangzi au fleuve jaune, fera temporairement de Yangzhou sa capitale qui connaît, grâce en particulier au commerce du riz et de la soie, un premier développement économique rapide.
Mais c'est sous la dynastie des Tang (618-907) que Yangzhou, qui contrôle le commerce du sel, connaît sa première et véritable apogée. Centre commercial cosmopolite situé à l'extrémité de la Route de la soie, la ville profite de l'ouverture générale de l'empire en direction de l'Asie centrale et du Moyen-Orient (notamment la Perse). Sa population, 470 000 habitants (soit l'équivalent de la population actuelle), en fait l'une des plus grandes cités du monde. Pas moins de 5000 étrangers y résident (contre à peine 200 aujourd'hui), principalement des marchands arabes, des moines japonais et des commerçants en provenance de l'Asie du Sud-Est. Point d'arrivée des nombreuses caravanes venant de l'ouest, point de passage du trafic fluvial entre les provinces de l'Empire, Yangzhou est également le point de départ de la propagation du bouddhisme au Japon par le moine Jiangzhen (688-763). Si, dès cette époque, la ville devient le centre incontournable des études bouddhiques en Chine, elle est également le lieu où se côtoient un grand nombre de religions dont l'islam et le nestorianisme.
Durant les sept siècles qui séparent la fin de la dynastie des Tang du début de celle des Qing (1644-1911), Yangzhou connaît des fortunes diverses tout en restant un centre économique important. Dans "Le devisement du monde", Marco Polo, qui aurait séjourné à Yangzhou de 1282 à 1284, où il aurait occupé des fonctions officielles au sein du gouvernement local, fait part de son étonnement face au développement d'une ville qui n'a pas d'équivalent dans l'Europe de l'époque. Si Yangzhou traversa une période de déclin au moment de la fondation de la dynastie des Qing, après avoir été violemment punie pour avoir opposé une résistance farouche à l'instauration du nouveau pouvoir, elle renouera très rapidement avec la prospérité et connaîtra, de la fin du 17ème siècle au milieu du 18ème siècle, une deuxième apogée. Les deux grands empereurs de la dynastie, Kangxi et Qianlong, effectueront de nombreuses visites dans la ville, réputée pour ses jardins et sa culture. En effet, les riches commerçants de la ville, principalement les sauniers, se comportent en véritables mécènes et participeront directement à la renommée de la ville. Les peintres en sont les premiers bénéficiaires : l'école de Yangzhou (Yangzhou Huapai) comme le groupe dit des "Huit Excentriques" (Yangzhou Baguai), qui sera actif pendant un siècle et dont l'influence marquera profondément les générations suivantes. Parmi d'autres, il convient de retenir le peintre Shitao (1641-1720), dont les "Propos sur la peinture du moine Citrouille amère" sont considérés comme l'un des textes de référence d'esthétique chinoise. Outre les peintres, les constructeurs de jardin, les écrivains (notamment Cao Xueqin, auteur du "Rêve dans le pavillon rouge"), les conteurs et les chanteurs d'opéra trouveront à Yangzhou les conditions matérielles nécessaires à l'épanouissement de leur art. Néanmoins, à l'image de l'empire, Yangzhou connaîtra une période de déclin tout au long du 19ème siècle et souffrira tout particulièrement de la révolte des Taiping.
Aujourd'hui, la ville conserve encore de nombreuses traces de cette riche histoire qui mêle économie et culture. Le lac Shouxi (46ha) est un condensé harmonieux des grands principes du paysage traditionnel chinois. Une vingtaine de jardins traditionnels subsiste, dont le jardin Ge construit par le peintre Shitao, alors que le Musée de la ville renferme une collection de peintures de premier ordre. D'autres sites peuvent être également mentionnés : le temple Daming, d'où partit pour le Japon le moine Jiangzhen, la tombe du Roi de Guanglin, de l'époque Han. Hérité de ce passé commercial et artistique, un artisanat actif (laque et jades sculptés notamment) subsiste aujourd'hui. Il convient également de noter l'existence d'une église, l'Eglise du Sacré Coeur, construite en 1864 par les Français et rouverte au culte depuis 1984. Connue également pour sa cuisine, Yangzhou dispose d'atouts nombreux pour développer le secteur du tourisme.
Yangzhou tente de renouer aujourd'hui avec son passé de centre économique et commercial, sinon à l'échelle du pays, comme ce fut le cas par le passé, du moins à l'échelle régionale. La ville, qui fut idéalement placée jadis au centre d'un noeud de communications, souffre néanmoins aujourd'hui d'un relatif enclavement du fait de l'absence de gare ferroviaire et d'aéroport. Le maintien d'un trafic fluvial important (le port de Yangzhou est l'un des plus importants du Yangzi) et la construction d'infrastructures routières (autoroutes Yangzhou/Shanghai et Yangzhou/Nankin, mise en service du pont routier de Jiangyin au-dessus du fleuve et construction d'un deuxième pont vers Zhangjiang) permettront de mieux relier la ville à la partie sud de la province, qui concentre les investissements étrangers le long de l'axe Shanghai-Nankin. L'économie de Yangzhou s'appuie sur quelques secteurs : la construction d'automobiles et d'autobus avec notamment une collaboration avec Mercedes-Benz, activité portuaire et chantier naval, textile, chimie, tourisme. C'est également une ville universitaire qui compte 20 000 étudiants.
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